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Archives Mensuelles: juin 2020

MISOGYNIE, la discrimination première

20 samedi Juin 2020

Posted by sporenda in Non classé

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Au cours de l’histoire humaine, la misogynie a été ce que l’historien de l’holocauste Daniel Goldhagen a nommé (en référence à l’antisémitisme) le « sens commun » de l’humanité. C’était un préjugé trop évident pour qu’on le remarque.

Dans différentes civilisations, à différentes époques, l’observation historique montre qu’il était considéré comme parfaitement normal pour les hommes de condamner les femmes, ou d’exprimer leur dégoût explicite envers elles simplement parce qu’elles étaient des femmes Toutes les grandes religions du monde et les philosophes les plus renommés ont vu les femmes avec mépris et une méfiance parfois proche d’un délire paranoïaque.

Durant l’âge classique, quand les femmes athéniennes étaient contraintes à rester enfermées chez elles pendant la plus grande partie de leur vie, ou vers la fin du Moyen-âge, quand les femmes étaient brûlées vives comme sorcières, ces persécutions n’étaient pas vues comme la conséquence d’un préjugé misogyne, bien que ces deux sociétés aient eu une longue tradition de dénigrement et de diabolisation des femmes. Un préjugé peut exister pendant longtemps avant qu’il ait un nom.

Aujourd’hui, dans de nombreuses parties du monde, des pratiques telles que le voile, la réclusion et l’excision sont toujours acceptées comme le sens commun de la société.

Selon le Humphrey Institute of Public Affairs, les femmes détiennent moins de 1% des propriétés dans le monde, l’UNICEF rapporte que, sur les 120 millions d’enfants dans le monde qui ne sont pas scolarisés, la vaste majorité sont des filles. En Inde, pratiquement tous les foetus avortés sont de sexe féminin.

Ce que l’histoire nous enseigne sur la misogynie, c’est qu’elle est omniprésente, persistante, pernicieuse et multiforme. Bien avant que les hommes aient inventé la roue, ils ont inventé la misogynie, et aujourd’hui, alors que des engins inventés par l’être humain roulent sur la planète Mars, cette invention immémoriale détruit encore des vies.

Aucun autre préjugé n’a été aussi durable, aucune « race » n’a souffert de traitements aussi préjudiciables pendant une période aussi longue, aucun groupe d’individus n’a subi autant de discriminations à une échelle aussi globale.

Aucun autre préjugé ne s’est manifesté sous des formes aussi différentes, apparaissant parfois avec la sanction de la société sous la forme de discriminations sociales et politiques, et parfois se manifestant dans le cerveau tourmenté de psychopathes. Et très peu ont été aussi destructeurs.

Dans le cas de la misogynie, si nous avons été si longtemps incapables de la voir, c’est parce qu’elle était partout sous nos yeux. »

Pour illustrer cette affirmation, l’auteur évoque le cas d’un serial killer (de femmes bien sûr, les serial killers ne tuent habituellement que des femmes, et ce sont presque toujours des hommes). Cet homme, Gary Ridgeway, a tué 48 femmes en 20 ans, surtout des femmes prostituées.

S’il avait tué des Juifs ou des Afro-Américains, ses meurtres auraient été identifiés comme racistes, « on aurait discuté l’état des relations inter-raciales aux Etats-Unis. Mais les actions de tueurs de masse comme Ridgeway ou Jack l’éventreur sont habituellement vues comme relevant de la psychiatrie.
Leur besoin de tuer des femmes est vu comme une aberration individuelle–alors qu’il est simplement l’intensification d’un préjugé commun. »

(« A Brief History of Misogyny », Jack Holland; traduction Francine Sporenda)

L’HETEROSEXUALITE, « naturelle » ou construite?

10 mercredi Juin 2020

Posted by sporenda in Non classé

≈ 1 Commentaire

Voilà des extraits d’un texte de la féministe radicale Sheila Jeffreys sur la non-naturalité de l’hétérosexualité. Bien évidemment, cette déconstruction de l’hétérosexualité n’implique en aucun cas que les femmes hétérosexuelles doivent être attaquées ou stigmatisées par les féministes.

Etre soumise peut être ressenti comme sexuel

Il n’y a pas de plaisir sexuel « naturel » Ce qui donne aux hommes et aux femmes des sensations sexuelles est construit à partir de la relation de pouvoir entre les hommes et les femmes, et ça peut être changé. Dans le « sexe », la différence entre hommes et femmes, censée être si « naturelle », est en fait créée. Dans le « sexe », les catégories « hommes–personnes avec le pouvoir politique–, et « femmes » –personnes appartenant à la catégorie subordonnée– sont exprimées charnellement.

Et le sexe n’est pas non plus une affaire privée. Dans la pensée masculine libérale, le sexe a été repoussé dans la sphère privée, et considéré comme le domaine de la liberté individuelle où les personnes peuvent exprimer leurs désirs et leurs fantasmes. Mais la chambre à coucher est très loin d’être privée, c’est une arène où la relation de pouvoir entre hommes et femmes se joue d’une façon particulièrement révélatrice. La liberté dans ce domaine est généralement la liberté des hommes de se réaliser sur et dans le corps des femmes.

Les ressentis sexuels sont appris et peuvent être désappris. La construction de la sexualité autour de la domination et de la soumission est censée être « naturelle » et inévitable, parce que les hommes apprennent à utiliser le symbole de leur appartenance à la classe dominante, le pénis, en relation avec le vagin de façon à assurer le statut subordonné des femmes. Nos sentiments et nos pratiques sexuelles ne sont pas séparables de cette réalité politique. Et je suggère que c’est l’ affirmation de cette relation de pouvoir, de cette distinction hiérarchisée entre les sexes par le biais de comportements de domination et de soumission, qui est centrale à la sexualité et crée l’excitation et la tension qui lui sont généralement associées dans le système de suprématie masculine.

Depuis les années 70, les théoriciennes féministes et des chercheuses ont révélé l’étendue des violences sexuelles, et comment l’expérience et la peur de cette violence limitent la vie des femmes et leurs opportunités. Les violences sexuelles sur les enfants empêchent les femmes de développer des relations fortes et aimantes avec leur propre corps et avec les autres femmes, et minent leur confiance en leur capacité à agir sur le monde.

L’effet cumulatif de ces violences crée la peur qui pousse les femmes à limiter leur déplacements et leurs actions, à vérifier si il y a quelqu’un sur le siège arrière de la voiture, fermer leur porte à clé, porter des vêtements « safe », fermer les rideaux… Face à cette réalité quotidienne de la vie des femmes , la notion qu’un orgasme (hétérosexuel), dans n’importe quelles circonstances, peut supprimer ces peurs et ces vulnérabilités accumulées est sans doute le plus cruel bobard du pseudoféminisme.

La violence masculine n’est pas l’oeuvre d’individus psychotiques mais le produit de la construction normale de la sexualité masculine dans des sociétés comme l’Australie et les Etats-Unis actuellement–en tant que pratique qui définit leur statut supérieur et subordonne les femmes. Si nous voulons sérieusement mettre fin à cette violence, nous ne pouvons pas accepter cette construction (de la masculinité) comme le modèle de ce qu’est vraiment « la sexualité ».

Le plaisir sexuel (hétérosexuel) pour les femmes est aussi une construction politique. La sexualité des femmes, comme celle des hommes, a été forgée sur le modèle dominant/dominé, comme un moyen de satisfaire et d’être au service de la sexualité construite par et pour les hommes. Alors que les hommes et les garçons ont été encouragés à diriger toute leurs émotions sexuelles vers l’objectification de l’autre et sont récompensés par le plaisir qu’ils retirent de la domination, les femmes ont appris leurs émotions sexuelles dans une situation de domination. Les femmes sont entraînées (à la sexualité) par l’abus sexuel, le harcèlement sexuel et des rencontres précoces avec des garçons et des hommes dans un rôle sexuel qui est essentiellement réactif et soumis. Nous apprenons nos émotions sexuelles dans des familles patriarcales dans lesquelles nous n’avons pas de pouvoir, entourées par des images de femmes-objets dans la publicité et les films.

Le formidable livre de Dee Graham « Loving to Survive » de 1994 voit la féminité et l’hétérosexualité comme des symptômes de ce qu’elle appelle « syndrome de Stockholm sociétal »… Le syndrome de Stockholm se développe chez des personnes qui craignent pour leur vie mais dépendent de ceux qui les tiennent captives. Si le geôlier montre un peu de compassion, aussi minime qu’elle soit, un otage va se lier à lui au point de le protéger et d’adopter son point de vue sur le monde. Dee Graham définit la violence que les femmes expérimentent quotidiennement comme du « terrorisme sexuel ».

Parce que la sexualité des femmes se développe dans ce contexte de terrorisme sexuel, on peut érotiser notre peur, notre lien terrifié (avec les hommes). L’excitation sexuelle et l’orgasme ne sont pas nécessairement positifs. Les femmes peuvent ressentir un orgasme quand elles sont sexuellement agressées étant jeunes, ou dans le viol et la prostitution…

Dans les magazines féminins et même féministes, la sexualité proposée apparaît comme séparée du statut subordonné des femmes dans la vie réelle et de leur expérience de la violence sexuelle et n’offre aucune possibilité de déconstruire et de reconstruire ni la sexualité des hommes ni celle des femmes. Le SM et les scénarios de fantasmes, par exemple, dans lesquels les femmes cherchent une perte d’elles-mêmes, sont souvent utilisés par des femmes qui ont été agressées sexuellement. L’excitation orgasmique ressentie dans ces scénarios ne peut pas être ressentie dans ces corps féminins si ils restent ancrés et conscients de ce qu’ils sont vraiment. L’orgasme de l’inégalité, loin d’encourager les femmes à créer une sexualité compatible avec la liberté recherchée par les féministes, ne récompense les femmes qu’avec un « plaisir » qui est le résultat d’une dissociation…

La poursuite de l’orgasme lié à l’oppression fonctionne comme un nouvel « opium des masses »… Une sexualité égalitaire, correspondant à notre poursuite de la liberté, reste encore à créer si nous voulons affranchir les femmes de leur assujettissement sexuel.

La capacité des femmes à érotiser leur subordination et à prendre plaisir à leur propre dégradation, à celle des autres femmes et à un statut d’objet sexuel pose un sérieux obstacle. Aussi longtemps que les femmes ont un enjeu dans le système sexuel tel qu’il est, aussi longtemps qu’elles en dérivent leur jouissance, pourquoi voudraient-elles le changer?

Je suggère qu’il n’est pas possible d’imaginer un monde dans lequel les femmes sont libres en même temps qu’elles défendent une sexualité basée précisément sur leur absence de liberté…. Seule une sexualité de liberté et notre capacité à imaginer et à travailler en vue d’une telle sexualité rend la liberté des femmes pensable ».

Sheila Jeffreys, « How Orgasm Politics Has Hijacked the Women’s Movement ».

Sheila Jeffreys est professeure de sciences sociales et politiques à l’université de Melbourne.

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